Un patrimoine botanique endommagé

Le jardin d'Al-Orman, l'un des plus grands et des plus anciens d'Egypte, a été gravement endommagé. Etat des lieux.

Le jardin d’Al-Orman, l’un des plus grands et des plus anciens d’Egypte, a été gravement endommagé. Etat des lieux.
28 feddans, soit 11,76 ha. C’est la superficie du jardin d’Al-Orman situé tout près de l’Université du Caire à Guiza. Ce jardin, dont le nom signifie « bois » ou « prairie » en langue turque, est l’un des plus anciens de l’Egypte moderne. « Ce jardin est la mémoire de la flore égyptienne », affirme le botaniste Sayed Hussein, directeur du jardin. Le jardin contient, en effet, des plantes rares qui remontent à plus de cent ans. Cet héritage botanique a été partiellement endommagé le mois dernier, au cours et après le sit-in des Frères musulmans sur la place Al-Nahda à Guiza située tout près du jardin.

Il suffit d’une petite tournée au jardin pour remarquer les dégâts subis pendant le sit-in qui a duré une quarantaine de jours. Un grand nombre de tiges de bambou ont été coupées et jetées par terre. « Les sit-inners ont utilisé ces tiges de bambou pour dresser leurs tentes », explique Emad Wadie, botaniste. « Heureusement cette période de l’année est favorable à la poussée de cette plante », ajoute-t-il. Les feuilles de lotus ont été également arrachées par les sit-inners. Ils s’en servaient comme parasols pour se protéger de la chaleur brûlante du soleil, notamment pendant le jeûne. « Nous avons perdu une grande quantité de lotus, une plante millénaire. Et nous devons attendre la saison prochaine pour la voir repousser », regrette le directeur. Il ne faut pas oublier la disparition de l’agrostis qui couvrait le sol du jardin.

Les tiges de bambou, coupées pour être utilisées au montage des tentes du sit-in. Photo Doaa Elhami
Les tiges de bambou, coupées pour être utilisées au montage des tentes du sit-in. Photo Doaa Elhami

Mais les dégâts les plus importants ont eu lieu au petit musée botanique (herbier) rattaché au jardin. Ce bâtiment renferme des spécimens floraux rares remontant à l’époque du khédive Ismaïl. Le bâtiment renfermait notamment un mobilier ancien remontant au roi Farouq Ier. Les armoires et les coffrets de ce musée botanique, dont la plupart sont couverts de velours bleu, ont été fortement endommagés. Citons à titre d’exemple, ces deux boîtes remontant au khédive Ismaïl qui ont été volées avec leurs contenus d’une valeur inestimable. De même, les vitres, les rideaux et les tiroirs des armoires royales ont été cassés. « Ce mobilier fait partie de notre héritage », souligne le directeur du jardin. Certains spécimens rares de plantes ont également disparu. Et deux tableaux qui représentaient la différence entre le coton égyptien et le coton étranger, et qui datent de l’époque royale, ont été aussi pillés. D’après la botaniste Mervat Abdel-Hakim, il y avait un nombre considérable de CD et de clefs USB, sur lesquels étaient stockées des données se rapportant au contenu du musée botanique, qui ont été volés ou endommagés. « Tout a disparu. Nous allons devoir recommencer le travail », regrette-t-elle. Même le carnet de visite, où les visiteurs du monde entier écrivaient quelques mots, a été endommagé. Trois ordinateurs, deux scanners et des caméras numériques ont été pillés. Cet équipement avait été fourni par la Bibliotheca Alexandrina pour y stocker des données se rapportant au patrimoine botanique du jardin. « Il est clair que ces pilleurs ignoraient la valeur et l’importance scientifique et historique de ce lieu. A quoi cela leur a servi de voler ces objets ? », se demande Wadie avec amertume.

– Lire la suite de l’article de Doaa Elhami, du 18/09/2013 sur hebdo.ahram.org.eg

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Image d’illustration : Johan Henrik Tandefelt (1781-1807), domaine public, via wikicommons

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