Où l’épareuse passe, le talus trépasse…

Pour ceux (nombreux) qui s’intéressent à la nature « ordinaire » et à la façon dont elle est traités par les agents de voirie, je recommande de visiter le blog « Bouriane verte » de Jean-Pierre JACOB où quelques photos édifiantes montrent ce que donne le mythe du « toujours plus propre » qui hante l’esprit de certains de nos citoyens.

N’hésitez pas à consulter les réactions à la suite de cet article, en particulier celle de Christian, dont voici un extrait :

« La biodiversité est un bien commun » et une nécessité qu’il faut préserver… Il faut savoir qu’avec les modifications apportées dans les prés, les champs, avec l’absence de pâtures sur certaines pelouses caussenardes… les plantes se réfugient sur les bas-côtés des routes surtout les orchidées qui préfèrent les pelouses tondues régulièrement en juin au rythme ancestraux des fenaisons.

Les « tontes raisonnées » dans l’est de la France sont une pratique courante mise en place depuis les années 80 avec des panneaux officiels les signalants, ces derniers fournis et mis en place par la DDE locale.

En 1989 le Ministère de l’environ après une étude confiée au SETRA a édité le rapport intitulé « La gestion extensive des dépendances vertes routières » avec en sous titre « Intérêts écologiques, paysagers et économiques » ce rapport est d’autant plus intéressant sur plusieurs aspects : l’intérêt de la biodiversité des bas-côtés routiers, (les normes de fauche réglementaire sont un mètre en ligne droite, 1.20 en virage et si le virage comporte des risques 1.60, ce qui est loin d’être pratiqué actuellement on est tombé dans un zèle frisant la paranoïa).

Sur le plan économique les chiffres sont hallucinants sur le nombre d’heures de tonte effectués, le matériel acheté et employé tout cela coûte très cher à l’ensemble de la communauté. Dans l’est on réduit considérablement ces coûts. Je suis toujours surpris que les associations naturalistes ne prennent jamais en compte c’est aspect de la biodiversité , de pollution (il faut savoir que les engins employés ont des émissions de gaz polluants deux fois supérieurs à un camion de 30T) et le côté économique n’est pas négligeable.

pas de alt pour cette image, soz

Daniel MATHIEU

14 commentaires

    1. ça me rappelle l’histoire de ce coiffeur :
      « je viens d’acheter une machine à raser automatique : on pose le masque sur le client et la machine le rase de près en 5 secondes
      – mais comment celà se peut-il, tous vos clients n’ont pas la même tête !
      – au bout d’une semaine, si ! ».

      L’épareuse, c’est la même histoire en moins drôle. J’en ai d’autres comme ça : l’histoire de l’élagage des haies dans le cadre des CTE, pour favoriser l’entretien de l’espace, je suppose que c’était aussi pour la biodiversité et le paysage au départ : résultat, des haies autrefois bien développées, ourlet, manteau, bien fleuries, etc aujourd’hui parfaitement taillées au carré.
      Etc

    2. Epareuse, ce que j’appelle le brontosaure à roulette…
      Ca fait dix ans que je déplore les dégats causés par cette machine infernale. Il faut croire que les esprits ne sont pas prêts à comprendre…

    3. Bonjour!

      travaillant pour un petit projet de Pro Natura (Suisse) je m’intéresse aux effets de l’épareuse. Notamment le fait qu’un laisse l’herbe après le passage pourrait gêner la croissance de certaines espèces sensibles (plantes héliophiles, orchidées, etc)

      si vous avez de l’expérience en ce domaine ou connaissez qq un, je serais très heureux d’obtenir de vos informations

      Roland Keller

  1. Malheureusement, c’est une pratique courante en bien des endroits. Les talus, point de résistance de certaines espèces qui demande un biotope particulier sont trop souvent saccagés, par des pareuses souvent mal utilisées et surtout utilisées fort mal à propos. Les taux de repousse d’espèces sont sur ces lieux en nette régression. Fort heureusement ce n’est pas le cas partout. Une fauche raisonnée participe à la sauvegarde de nombreuses espèces (souvent rares), qui trouvent refuge sur les talus, car les prairies sauvages qui ne sont plus occupées par les ovins et bovins tendent à disparaître. Plus de fauches régulières non plus. Foins et refoins trop souvent abandonnés au profit de mono cultures intensives.
    Pourquoi ne pas préserver ce « Jardin Botanique » facile à entretenir à peu de frais. Détruire sans réflexions aucune est devenu très commun sous prétexte de faire propre (la bonne excuse……)

  2. Au printemps et en été je pars de mon village en voiture : 12 km à travers la forêt pour atteindre la gare de Rambouillet. Et je m’extasie naïvement sur les petites taches de petites fleurs jaunes, ou blanches ou rouges ou bleues, et puis au bout du trajet, j’aperçois la grosse faucheuse de la DDE qui vient à ma rencontre et qui rase tout cela pour nous donner enfin ce beau béton vert qui fait tant plaisir à mes concitoyens … et peut-être aussi pour justifier le gros budget de la DDE, et de tous ces fonctionnaires départementaux, et de leurs chefs, et des passeurs de marchés de matériel, et des politiciens du Conseil Général (un des plus pourris de France : 90 mises en examen au dernier procès) qui les protègent. Eux aussi doivent pouvoir bien vivre…
    et puis cela permet d’avoir l’impression visuelle que la route est plus large, qu’on peut aller plus vite… Bref, que du bonheur pour tous. Alors qui va se soucier de ces ridicules taches de petites fleurs de merde et des insectes qui pourraient les butiner sans la grosse faucheuse ?
    Simonpierre DELORME

    1. Ce n’est pas toujours comme cela. Il y a de nombreux talus d’autoroute qui ne sont fauchés que deux fois par an, et où on laisse des fleurs fanées tout l’hiver. regardez l’A86 en IdF, par exemple, ou l’A35 en Alsace.

      Par ailleurs, une des raison de la tonte rase des bords de route est qu’elle facilite le ramassage des canettes et autres bouteilles jetées par les automobilistes. Tant que ceux-ci se comporteront comme des porcs, et qu’ils ne subiront aucune répression, les DDE seront obligées de « nettoyer » les bords de route.

  3. Je suis membre de la Société Française d’Orchidophilie (SFO) et cartographe des sites à orchidées de Dordogne. 138 stations d’orchidées ont été recensées sur les talus routiers et donc fauchés chaque année. 68 sur des routes communales, 70 sur des routes départementales. On est bien sûr loin du compte, ne prenant pas en considération les milliers de pieds isolés.

    En 2005 j’ai alerté le responsable des routes départementales qui travaille au Pôle Paysage du Conseil Général. La Dordogne réprésente 5000 kilomètres de routes départementales correspondant à 4500 hectares de dépendances vertes à gérer. Un écologue a été mandaté pour dresser un bilan des talus routiers et une série de réunions a eu lieu chaque mois entre cet écologue, le Pôle Paysager, les agents de la DDE et moi-même. Entre autres thèmes : le fauchage, les herbicides, les ligneux … Au terme de l’année 2006, une brochure d’information a été publiée et les agents routiers bénéficiaient en 2006 et 2007 d’une formation englobant technique et sensibilisation.

    Actuellement 17 talus à orchidées sont officiellement protégés du fauchage. Quatre supplémentaires cette année. En 2007, le CREN Aquitaine protègeait de la même manière des talus à Tulipa sylvestris. Cette année, des talus à fougères à statut seront préservés dans le PNR Périgord Limousin. Un collègue du Lot envisage une opération analogue dans son département… L’idée fait son chemin, mais elle est lente à appliquer car elle repose sur un changement des mentalités des agents.

    Le fauchage est indispensable à la biodiversité des talus routiers à condition qu’il soit pratiqué selon des règles convenables et au bon moment : une fauche de printemps dite « de sécurité » (1m de large, 8cm de haut) uniquement sur le bas-côté et sur les talus à l’intèrieur des virages serrés, puis une fauche d’été englobant bas-côté, fossé et une partie du talus. La fauche de printemps est parfois doublée selon les conditions routières, mais en tous les cas, la deuxième est identique à la première. La fauche d’été est indispensable car elle dissémine les graines. Elle pourrait presque s’apparenter à un pâturage. Précédemment destructeur, le fauchage devient écologique.

    Dorénavant, le but du Pôle Paysager est ZERO HERBICIDE.

    La sensibilisation des agents communaux est beaucoup plus difficile car il n’y a pas de coordinateur et les principes de travail se résumeraient plutôt en « Chacun fait ce qu’il lui plaît ». Nous lançons cette année une sensibilisation auprès des membres de la SFO Dordogne et par contrecoup auprès des maires pour faire bénéficier gratuitement les agents communaux des trois jours de stage initiés par le Pôle Paysager pour ses propres agents. Certaines actions démarreront aussitôt après les élections.

    Pour plus d’informations sur mon expérience, j’ai publié un article dans « L’ORCHIDOPHILE » n°169 de juin 2006.

    Jean-Marie Nadeau

    1. Jean-Marie,

      Penses-tu qu’il soit possible que Tela publie en ligne l’article que tu mentionnes sur votre travail en direction des agents de l’équipement pour la protection des orchidées ? Je pense que cela intéresserait pas mal de gens…

      Si oui, me contacter directement à dmathieu at tela-botanica.org

      Daniel Mathieu

    2. Bonjour,

      Avec Pro Natura Suisse, nous avons entrepris une petite étude sur l’effet que pourrait avoir le mulch qu’on laisse après le passe de l’épareuse. Nous avons commencé en 2009 et en certain endroits les épareuses font des dégâts (sol décapé) mais sur ce point cela va encore pas trop mal. C’est par soucis d’économies que l’on est passé de la fauche avec lame horizontale à l’épareuse. Il le fallait bien mais reste la question de ce mulch qui pourrait contrecarrer la croissance de plantes sensibles, les plantes en général intéressantes du point de vue de la biodiversité.

      je serai aussi heureux de voir votre article en ligne et de recevoir vos suggestions à propos du mulch, si vous avez quelque expérience en ce domaine.

      Avec mes cordiales salutations

      Roland Keller

  4. Pour mémoire, une synthèse de discussions sur les forums de Tela Botanica à été réalisée en 2005 à partir de la thématique des abords routiers. Cette synthèse comporte en introduction une webographie avec des liens vers plusieurs documents ou plaquettes très intéressants sur ce sujet.

    Daniel Mathieu

  5. il serait important d’avoir à notre disposition des panneaux signalants les endroits où nous découvrons des orchidées sauvages afin de les installer ensuite. Je ne sais pas si la SFO est prête à franchir le pas.

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