Étudier les effets des changements climatiques sur la flore des sommets pyrénéens
Si les climatologues du GIEC n’ont plus aucun doute sur la réalité du réchauffement de notre planète, ses impacts à des échelles plus locales sont encore peu connus.
Entre 1949 et 2010, les Pyrénées ont enregistré une augmentation moyenne de leur température de 1,2°C et accusent une baisse de leurs précipitations (moyenne là aussi) de 2,5% (données de l’Observatoire Pyrénéen du Changement Climatique). Toutefois, ces évolutions diffèrent beaucoup selon les versants et les vallées, selon que l’on soit au nord, au sud de la chaîne, à l’est ou à l’ouest. Situées entre océan Atlantique et Méditerranée les Pyrénées présentent un haut degré de vulnérabilité et sont particulièrement représentatives des principaux défis climatiques dans les zones de montagne.
En ce qui concerne la biodiversité, et plus précisément la flore, plusieurs programmes de suivi sont actuellement en cours pour comprendre les effets des changements climatiques sur la végétation de moyenne et de haute-montagne dans les Pyrénées.Le programme transfrontalier FLORAPYR, animé par le Conservatoire botanique national des Pyrénées et de Midi-Pyrénées est un programme scientifique au long cours dont l’un des objectif est de mieux comprendre la réponse de la végétation en montagne dans un contexte de changement climatique global.
Dans ce cadre, le programme FLORAPYR contribue au déploiement dans les Pyrénées le programme international GLORIA, (Global Observation Research Initiative in Alpine environments) dans les Pyrénées françaises. Deux sites avaient déjà été installés il y a quelques années dans les Pyrénées aragonaises, avec le soutien du Gouvernement de l’Aragon. En 2018, grâce à FLORAPYR, un nouveau a été installé par la Fédération des réserves naturelles catalanes dans les Pyrénées orientales. Le Conservatoire botanique s’occupe quant à lui d’implanter un site dans les Pyrénées centrales françaises. Il s’agit pour les équipes du Conservatoire de réaliser l’inventaire floristique complet de 4 sommets pyrénéens, chacun culminant à une altitude différente autres (entre 2 200 et 2 400m ; 2 400 et 2600m ; 2 600 et 2 800m et à plus de 2 800m).
Impératif : trouver 4 sommets situés non loin les uns des et étant peu fréquentés des randonneurs (afin que le piétinement ne vienne pas fausser les résultats).
L’inventaire de deux premiers sommets avait été réalisé à l’été 2018 (le petit pic Cardal et le pic du Cardal, respectivement à 2 312 et 2 563 m d’altitude). Prévu pour l’été 2019, l’inventaire des deux plus hauts sommets a été réalisé en cette fin juillet. Le 29 juillet à 5h30 du matin, une première équipe du Conservatoire botanique quittait Bagnères-de-Bigorre en direction de Gavarnie et de la vallée d’Ossoue pour rejoindre le pic du lac des Gentianes (2 729m) et le pic de Labas (2 947m), point culminant de l’expédition.
Durant 3 jours (passés sous tente à proximité du refuge de Baysselance) les botanistes et chargés de projet du Conservatoire se sont attelés à déployer le protocole GLORIA sur ces deux sommets, profitant d’une vue imprenable sur le Vignemale et le cirque de Gavarnie, surveillés attentivement par les vautours fauves et un couple de Gypaète barbu.Rejoints à la journée par leurs collègues, ils ont pu effectuer l’inventaire floristique complet du pic de Labas et du pic du lac des Gentianes, appliquant à la lettre le protocole scientifique du programme GLORIA. Une rigueur indispensable car l’objectif pour le Conservatoire est de revenir tous les 7 ans réaliser un nouvel inventaire, en suivant rigoureusement le même protocole (impératifs de répétabilité et de précision pour que les résultats puissent être comparés et analysés avec la rigueur statistique qui s’impose).
Chacune des faces des sommets choisis a fait l’objet d’un inventaire exhaustif de la part des botanistes, et, à chaque point cardinal ont été installés des « quadrats » qui ont servi à effectuer des relevés de végétation dans le but d’obtenir une estimation statistique des taux de recouvrement.Les résultats ainsi obtenus serviront de témoin, de base, pour être comparés aux futurs relevés… dont les prochains sont prévus pour 2026 (puis 2033, 2040 et ainsi de suite).
2 commentaires
C’est bien joli de recenser les plantes qui disparaissent en Pyrénées (comme ailleurs) mais çà sert à quoi, si on ne change pas nôtre mode de vie basé sur le « matériel » destructeur du milieu naturel ?
C’est comme recenser les villages qui meurent et leurs habitants sans se préoccuper de comprendre pourquoi ils en arrivent là, … et changer de cap !
En est t ‘il encore temps ?
Il serait plus utile d’enseigner aux enfants dès le plus jeune âge le respect de la nature, par des sorties de découverte de ce milieu naturel dans lequel ils grandissent et qui leur est vital, ainsi que supprimer les subventions européennes à l’agriculture (qui incitent à la production industrielle consommatrice de produits nocifs).
Et de délester les cités pour repeupler les campagnes par des activités respectueuses de l’environnement qui elles pourraient être subventionnées.
Bonjour Jean-Yves,
De mon point de vue, réaliser des études naturalistes, suivre l’évolution de la flore en réponse à tel ou tel facteur, etc., ne peuvent être mis en opposition avec les aspects pragmatiques que vous évoquez (et à propos desquels je vous rejoins grandement). Tous ces aspects ne sont pas exclusifs les uns des autres, bien au contraire. D’autant que les écologues (botanistes et autres) sont les premiers convaincus des changements de société nécessaires.
Cordialement