Légende chinoise : L’arbre des amours languissantes

Les légendes chinoises qui mettent en scène des espèces végétales sont nombreuses. En voici une, plutôt émouvante.

Dans un poème fameux, Combien de filaments pour une racine de lotus 《问莲跟有丝多少》 [wèn lián’gēn yǒusī duōshǎo], qui parle d’une histoire d’amour tragique, le poète chinois Yuan Haowen (元好问) (1190-1257) évoque une autre tragédie amoureuse qui s’est produite au IIIe siècle avant l’ère commune. C’est l’histoire de « l’arbre des amours languissantes ».

Cette histoire se déroule à la fin de l’époque des Royaumes Combattants, dans le royaume de Song, à l’époque du règne du roi Kang (宋康王 [sòng kāngwáng], mort en 286 avant l’ère commune). L’un des conseillers du roi, Han Ping (韩凭 [hán píng]) avait épousé Dame He (何氏 [hé shì]), qui était d’une très grande beauté. Le roi convoitait la dame en question, aussi fit-il assassiner Han Ping et prit-il Dame He de force.

Cette dernière fut désespérée au point de se jeter de la haute tour dans laquelle elle était retenue prisonnière. Avant de mettre fin à ses jours, elle laissa une lettre adressée au roi Kang, le suppliant de l’enterrer auprès de son époux. Mais le roi, furieux, décida de creuser sa tombe en face de celle de Han Ping : les époux défunts pourraient se voir, mais seraient condamnés à rester séparés pour l’éternité.

Une chose extraordinaire se passa alors : deux immenses arbres poussèrent sur les tombes. Les arbres s’inclinèrent l’un vers l’autre et nouèrent leurs branches. Dans le sol, leurs racines s’entremêlèrent. Les sujets du royaume de Song en furent émus, et donnèrent à cette espèce d’arbre le nom d’arbre des amours languissantes.

On ignore quel était exactement l’espèce qui a poussé sur les tombes, mais le nom chinois de l’arbre aux amours languissantes (相思树 [xiāngsīshù]) désigne aujourd’hui Acacia confusa, l’acacia de Formose, espèce originaire d’Asie du Sud-Est, aujourd’hui largement diffusée dans les zones tropicales du Pacifique. A Taiwan, le bois de cet arbre, très résistant, était utilisé pour fabriquer des étais de mine ou des traverses de chemin de fer, ou encore pour confectionner des meubles et des outils agricoles. Différentes parties de l’arbre sont également utilisées en médecine chinois traditionnelle.

Acacia confusa à Hawaï (Forest & Kim Starr / CC BY)

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