Preal, un arbuste multifonctions du Cambodge

A la découverte du « preal », un arbuste cambodgien aux usages multiles...

La période de la toussaint cambodgienne, la fête de Pchum Ben, qui s’étend sur une quinzaine de jours en septembre, est celle pendant laquelle les Cambodgiens ont l’habitude de faire grande consommation d’une friandise bien connue, le num ânsâm (នំអន្សម), sorte de gâteau de riz glutineux, farci de viande de porc dans sa version salée, ou d’une petite banane dans son avatar sucré, enveloppé dans des feuilles de bananier ou de lotus. La saison s’y prêtant, nous avons passé un samedi entier à confectionner une quantité astronomique de ces préparations, pour notre consommation personnelle, et à distribuer aux parents et amis.

De nos jours, le num ânsâm est solidement ficelé à l’aide d’un fil de nylon. Mais avant que l’utilisation de ce fil synthétique ne se généralise, on utilisait une ficelle grossière confectionnée à partir de l’écorce d’un arbuste appelé « preal » (ព្រាល, prononcer [priel]). Notre cuisinière, originaire de la campagne, met un point d’honneur à rejeter la modernité dès qu’elle le peut, et s’est donc mise en devoir de parcourir les marchés de Phnom Penh à la recherche de cette ficelle de preal.

Avant utilisation, le fil de preal doit être mis à tremper, sinon il est trop cassant (comme le raphia).

Ci-dessous, des num ânsâm ficelés avec de la ficelle de preal et une bobine de ce fil (les deux photos sont de l’auteur).

Le « preal » est connu sous le nom binomial de Colona auriculata. Cette espèce se trouve au Cambodge, Laos, Vietnam et Malaisie.

En khmer, on connaît aussi l’espèce sous les noms de « preal à ficelle » (ព្រាលខ្សៃ [preal khsaè]) ou de « preal à torche » (ព្រាលចន្លុះ [preal chân-loh]). Ce deuxième nom fait référence à une autre utilisation de l’arbuste : ses feuilles, mélangées à de la résine d’arbre, constituent la portion combustible de torches. Il s’agit d’un arbuste haut de deux à trois mètres, qui préfère les sols humides, les plaines, les forêts claires et les berges des cours d’eau.

La racine de cette espèce est également connue au Cambodge pour ses vertus médicinales. Deux auteurs signalent que la racine est fébrifuge. Le volume 3 de la collection Cambodia Medicinal Plants publiée par le Ministère cambodgien de la Santé précise encore que la décoction de la racine est efficace contre les douleurs osseuses, qu’elle est bénéfique pour les nerfs, et qu’elle favorise la lactation.

Le fruit, en revanche, ne doit pas être consommé car il est toxique.

Ci-dessous, l’illustration de l’ouvrage du Ministère de la Santé :

4 commentaires

  1. Excellent article. Bravo!

    Dans l’ancien temps, on a utilisé également « Preal » pour tresser le hamac dans notre région et à la campagne cambodgienne. Actuellement,le hamac est fabriqué en fil de nylon. Ce genre de hamac moderne est introduit par les militaires américains pendant la guerre en ASE (?)

    1. Non, non, je parle bien du raphia.
      Oui, le raphia est souple quand il est sec, mais il a tendance à se casser assez facilement lorsqu’il est soumis à une traction. Le maître d’art floral suisse Peter Heiss, pour lequel j’ai servi d’interprète pendant de nombreuses années, recommandait toujours à ses élèves de faire tremper le raphia avant de l’utiliser pour réaliser des ligatures. Cela permet non seulement de le rendre plus résistant à la traction, mais aussi de renforcer les ligatures car il a tendance à rétrécir un peu quand il sèche.
      Vous devriez essayer 🙂

Répondre à Metapodocarpoxylon Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.