Les questions botaniques : réponses

Il y a un mois, Tela Botanica lançait #LesQuestionsBotaniques afin de vous donner la possibilité de nous transmettre vos interrogations sur la botanique. Nous revoilà aujourd'hui pour partager les réponses à vos questions !
Une du site(5)

Les questions-réponses

Asphodelus albus
Asphodelus albus par Jean Paul Saint Marc CC BY-SA, Tela Botanica

Question 1 : Y-a-t-il une corrélation entre la couleur des fleurs et la floraison des plantes ?

Le contexte de la question :

« Je voudrais savoir si la couleur, donc les pigments qui composent la couleur des pétales d’une plante jouent sur la floraison dans l’année. Car si on observe les floraisons sur un année, on peut généraliser d’abord les fleurs blanches, puis les jaunes puis les roses-rouges-violettes et bleues, puis vertes-marrons.

Peut-on en conclure que la formation des couleurs prend plus de temps ou bien que la floraison des fleurs de certaines couleurs est plus coûteuse en énergie ou que la couleur n’a aucun rapport ? »

La réponse :

D’après de nombreuses études portant sur la couleur des fleurs, rien n’indique une corrélation possible entre la couleur florale et la phénologie. La couleur des organes floraux dépend des pigments en général, rien n’indique que certains pigments seraient plus coûteux que d’autres. Selon les espèces la couleur peut avoir été déterminée (entre autre) par des pressions de sélection exercées par les communautés de pollinisateurs disponibles, par le climat de la zone géographique (température/humidité), ou encore par des pressions de sélection exercées par la communauté de plantes.

Il faudrait regarder ce que voient les insectes qui ne perçoivent pas le rouge mais voient dans l’ultra-violet. Les Diptères sont attirés par le blanc au printemps, jaune et bleu sont pour les Lepidoptères et certains Diptères, et les UV pour les Hyménoptères. Il y a probablement une liaison couleurs des fleurs entomogames et insectes pollinisateurs (65 millions d’années de coévolution !), mais il y a encore beaucoup de travail à faire.

En altitude les plantes sont plus pigmentées afin de protéger la chlorophylle des UV. Enfin, au-delà des saisons de floraison, il faudrait aussi regarder par type de végétation et par région climatique…

Coronilla varia2
Coronilla varia L. par John De Vos CC BY-SA, Tela Botanica

Question 2 : Comment distinguer précisément une annuelle par rapport à une pérenne ?

La réponse :

Pour les distinguer, vous pouvez tirer doucement en prenant la plante au collet : si tout le système racinaire sort la plante est annuelle, si cela casse au collet elle est vivace (= pérenne). Si la plante résiste, nous ne sommes pas forcés de casser ! On peut aussi replanter l’annuelle en arrosant pour recoller les racines à la terre.

Les herbacées vivaces à rhizome peuvent aussi parfois s’extraire facilement si le rhizome est en surface, donc le replanter.

La présence de pousses stériles est aussi un critère pour reconnaître les vivaces non ligneuses. Les annuelles ou bisannuelles en sont dépourvues

Question 3 : Existe-t-il un moyen simple et efficace pour différencier les Scabieuses (Scabiosa) des Knauties (Knautia) ?

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Knautia arvensis (L.) Coult. et Scabiosa atropurpurea L. par Bertrand Bui et Jean-Luc Gorremans CC BY-SA, Tela Botanica

La réponse :

La scabieuse a des écailles entre les fleurons, sur le réceptacle du capitule tandis que la knautie n’a pas d’écailles mais des poils à ce même endroit. À condition de ne pas prendre les arêtes calicinales, dépassant les fleurons des scabieuses ou des knauties, pour les soies du réceptacle.

Les fleurs du bord de l’inflorescence ont 4 pétales pour les Knauties, 5 pour les Scabieuses.

Question 4 : Quelle est la différence entre Erysimum cheiri et Erysimum duriaei ?

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Erysimum cheiri (L.) Crantz et Erysimum duriaei subsp. pyrenaicum (Jord. ex Nyman) P.W.Ball par Philippe Gilot et Mathieu Menand CC BY-SA, Tela Botanica

La réponse :

Erysimum cheiri est une plante vert foncé avec des pétales jaunes d’or tirant sur l’orange. Erysimum duriaei est une plante vert clair avec des pétales jaune citron.

Question 5 : Quelle est cette formation étrange qui s'enroule autour des feuilles de cet arbuste ?

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Photo par Jean Hiriart

La réponse :

D’après la Flore Chaumont Vexin Thelle, cette structure particulière est en réalité « une rouille sur clématite : Puccinia persistens qui fait partie des Mycocécidies (Galle -cécidie- due à des champignons -myco-). Elle s’attaque aux pétioles des feuilles de Clématite donnant des « boursouflures » très caractéristiques, courbes et ponctuées de points oranges, tordant le pétiole. Cette rouille a besoin d’un second hôte pour accomplir sa reproduction, en l’occurrence une Graminée, le Chiendent. »

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Nenuphar Link par Martine Bénézech CC BY-SA, Tela Botanica

Question 6 : Lorsqu’il y auto-fécondation sur un arbre greffé, pourquoi le fruit ne donne-t-il pas un arbre avec des fruits de même qualité ?

La réponse :

Seuls les individus homozygotes (dont les deux copies de chaque gène / les 2 allèles sont identiques) peuvent donner des individus possédant la même combinaison génétique qu’eux et donc des fruits de même qualité. Pour les fruitiers, l’essentiel des individus sélectionnés sont fortement hétérozygotes et leur descendance est donc différente du parent (contrairement aux céréales où les variétés récente cultivées sont des lignées fortement homozygotes).

De plus, les cultivars d’arbres fruitiers sont habituellement des clones. La seule façon d’obtenir des descendants offrant les mêmes caractéristiques est précisément le greffage. Mais comme ces clones sont non seulement très hétérozygotes, mais aussi fortement auto-incompatibles, il faut planter à proximité des arbres d’une autre classe de compatibilité pour qu’ils donnent des fruits en abondance. C’est ce qui explique qu’un arbre isolé donne souvent peu de fruits.

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Androsace maxima L. par Jean-Claude Calais CC BY-SA, Tela Botanica

Question 7 : Quelle est la différence entre les termes "carpelle", "ovaire", "gynécée" et "pistil" ?

La réponse :

Gynécée et pistil sont synonymes mais le second terme tend à prendre le pas en français.

Le gynécée (ou pistil) est la partie femelle de la fleur. Il est composé, selon les familles (ou parfois selon les espèces au sein d’une même famille) d’un ou de plusieurs carpelles qui peuvent être soudés entre eux (cas général) ou pas. Dans tous les cas, le gynécée ou pistil est l’ensemble des carpelles d’une fleur.

Un carpelle est fondamentalement composé, de bas en haut :

  • d’une partie généralement renflée et creuse qui contient un ou des ovules : c’est l’ovaire
  • d’un prolongement (souvent fin et long, parfois court voire absent) : le style
  • d’une partie supérieure, le stigmate, qui reçoit les grains de pollen.

Pour aller plus loin :

Lorsque le gynécée est formé de plusieurs carpelles soudés entre eux (cas le plus répandu), les modalités de soudure sont diverses.

  • la soudure peut affecter les ovaires (des différents carpelles) mais ni leur style ni leur stigmate.Le gynécée présente alors une masse ovarienne (qui semble) unique et qu’on appelle aussi l’ovaire (sous entendu ici : l’ovaire du gynécée). Mais on peut souvent constater son caractère composite en faisant une coupe transversale dans cet ovaire.
  • la soudure peut affecter, comme précédemment, les ovaires, mais aussi les styles. Seuls les stigmates restent libres. Ces derniers peuvent être plus ou moins rapprochés mais on distingue au moins des lobes dans la partie stigmatique du gynécée, à son sommet donc. Exemples :  la Tulipe, avec un stigmate à 3 lobes. Comme ces trois lobes correspondent chacun au stigmate d’un des trois carpelles, on peut aussi dire que l’on voit 3 stigmates. En faisant une coupe transversale au niveau ovarien du gynécée, on voit nettement trois loges correspondant à l’ovaire de chacun des trois carpelles.
  • la soudure totale des carpelles, depuis leur ovaire jusqu’a leur stigmate, est beaucoup plus rare.

De sorte qu’en comptant les styles ou les stigmates, on déduit aisément (en général) le nombre de carpelles qui constituent de tels gynécée dont les carpelles sont plus ou moins soudés.

Question 8 : Comme différencier Agrostis capillaris et Apera spica-venti ?

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Agrostis capillaris L. et Apera spica-venti (L.) P.Beauv. par Pascal Bergeot et Mathieu Menand CC BY-SA, Tela Botanica

La réponse :

Apera spica-venti a des fleurs à lemme aristée, ce n’est pas le cas d’Agrostis capillaris.
De plus, Apera a beaucoup plus de fleurs qu’Agrostis.

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Catananche caerulea L. par Jean-Jacques Houdré CC BY-SA, Tela Botanica

Question 9 : Comment des plantules de certaines espèces survivent au stress hydrique et brûlures aux UV-B ?

Le contexte de la question :

« Dans les Cévennes méditerranéennes, sur lithosols, j’ai constaté que les pins maritimes et les pins de Salzmann, notamment, germent en fin d’hiver/début de printemps, puis restent au stade plantule durant tous les mois d’été, en exposition plein soleil (avec très souvent bien plus de 40 °C au sol) et sans la moindre goutte d’eau, soit jusqu’à 3 ou 4 mois dans une « poussière » faisant office de maigre substrat aride. De même, dans le Roussillon, je fais le constat identique avec le pin pignon et le pin parasol, voire d’autres espèces comme le chêne liège, le genêt d’Espagne ou le cyprès vert, par exemple.

Comment font ces plantules pour éviter le stress hydrique et les brûlures aux UV-B, donc à un dessèchement létal sous des chaleurs aussi intenses et sans eau ? »

La réponse :

Pour les UV-B, il est possible que la plante fabrique des flavonols lui permettant de filtrer les rayonnements UV. Ces pigments sont invisibles à l’œil nu.

En fermant les stomates, ou en les enfonçant dans les feuilles, on évite la transpiration et donc la perte d’eau. Ceci associé à une cuticule épaisse des feuilles. Si les sols paraissent secs en surface, ils ont une réserve en profondeur. Malgré son apparente sécheresse, le bassin méditerranéen enregistre quand même entre 500-1000 mm de pluie annuelle ! Les germinations sont installées sur des fissures et pas directement sur la dalle.

Datura stramonium
Datura stramonium L. par Martine Bénézech CC BY-SA, Tela Botanica

Question 10 : Quelle est l'étymologie de "stigmate" ?

La réponse :

Le Trésor de la Langue Française informatisé (TLFi) indique : “du grec « piqûre » et spécialement « piqûre au fer rouge »; le sens de « piqûre » d’où « ouverture minuscule comme celle qui est faite par une piqûre » explique le sens technique du mot”.

Eriophorum latifolium
Eriophorum latifolium Hoppe par Michel Démares CC BY-SA, Tela Botanica

Question 11 : Qu'est-ce que le phénomène de guttation ?

La réponse :

Lorsque le sol est très humide, l’eau pénètre dans la plante par les racines car le potentiel hydrique des racines est plus faible que celui du sol. Si ce phénomène coïncide avec un air très humide et froid, l’évapotranspiration ne parvient pas à éliminer l’excédent d’eau, si bien que la pression racinaire force cette eau en excès à exsuder de la plante par des structures spéciales, les hydathodes, formant des gouttelettes au bord des feuilles ou des sépales.

Pour finir...

Merci pour votre participation et merci au Conseil scientifique et technique de Tela Botanica pour leur aide dans la recherche de réponses.

Vous avez des éléments de réponse complémentaires à apporter ? Proposez-les en commentaire de cet article en précisant le numéro de la question.

Vous avez d’autres questions ? Posez-les sur le forum de l’espace projet Botanique générale afin d’y trouver une réponse auprès de la communauté des telabotanistes.

  • Les questions botaniques

    Il y a peut-être une question botanique que vous vous êtes toujours posée, qui vous taraude ou vous tracasse ? C’est le moment de la poser ! Avec #LesQuestionsBotaniques, partagez …

8 commentaires

  1. pour l’autofertilité, je nuancerai la réponse; bien sûr le principe « qui fait un oeuf , fait du neuf  » reste vrai , mais chez les pruniers , il existe au moins 3 variétéss du nord de la france qu’il n’est pas besoin de greffer : la noberte, la prune d’octobre=altèse blanche=Ste Catherine, et la prune de floyon ; comment expliquer la reproduction fidèle par semis, sinon par autofécondation et constitution d’un pool génétique homogène par des autofécondations successives? à noter que la noberte est si particulière que l’arbre s’appele le nobertier et que le pomologue belge Charles Populer l’inféodait aux schistes de la Famene. Qui n’ a jamais gouté de confiture de Noberte , ne sait pas ce qu’est une bonne confiture de prune

    1. C’est bien pourquoi nous avons écrit « habituellement », car il y a de nombreuses exceptions. Certaines espèces peuvent se multiplier par graines, comme l’amandier. Mais il faut alors attendre qu’ils fructifient pour savoir si les amandes sont douces ou amères.
      D’autres espèces comme les agrumes présentent une caractéristique étonnante : lapolyembryonnie. A côté de l’embryon zygotique, issu normalement de la fécondation de l’ovule par du pollen, se développent dans la même graine un ou plusieurs embryons nucellaires. Ceux-ci se développent sans fécondation à partir de cellules du nucelle, tissu à 2n chromosomes voisin de l’ovule. Ils l’emportent souvent sur l’embryon zygotique. La plante qu’ils donnent est génétiquement identique à la mère, les virus en moins.
      Pour vos variétés de prunes, il faudrait vérifier. Certaines espèces sont plus tolérantes que d’autres à l’autofécondation. Et il faut se rappeler que le prunier européen est hexaploïde. Enfin, un même morphotype peut cacher plusieurs génotypes…
      Par ailleurs, il existe d’autres procédés pour multiplier des clones : le bouturage, le marcottage, la culture de rejets (sans parler des techniques modernes).
      Il faudrait tout un livre pour détailler la multiplication des arbres fruitiers. Ce n’était pas possible pour une simple réponse.

  2. Cette rubrique est juste fantastique, merci merci de l’avoir lancée et d’y répondre à une de mes questions les plus essentielles, comment distinguer knauties et scabieuses, j’adore ! en plus avec un indice que mes zyeux peuvent voir 😀 et quand tout crame, quand tout est noir, la légèreté de cette question, une joyeuse petite bouffée d’air pur, et nous étions donc plusieurs à se la poser ! Voilà, autour de chez moi, et dans mon jardin, ce sont des knauties 🙂

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