L’illustration botanique : le renouveau ? #Art et botanique

L'illustration botanique en devenir : une contribution à l'appel à articles "Art et botanique" par Elisabeth Vitou.
Elisabeth Vitou T-Coquelicot
Coquelicot, aquarelle réalisée par Elisabeth Vitou, format 24 X30 cm - Copyright ©Elisabeth Vitou

L’illustration botanique : le renouveau ?

Le végétal est aujourd’hui omniprésent. Qu’il s’agisse de l’alimentation (car faut-il encore manger carné ?), la médecine (n’en déplaise à la doxa officielle…), le bâtiment (béton végétalisé, mur végétal…), le vêtement (tee shirts, chaussettes en fibres d’ortie ou bambou …), la cosmétique (depuis longtemps)… Et on pourrait allonger cette liste.

Ce sursaut correspond aussi à la crainte actuelle de voir la « nature » (i.e. le végétal) disparaître, du fait des changements climatiques, de l’urbanisation galopante – et du mépris avec lequel l’homme la traite trop souvent.

Et le monde de l’art n’échappe pas au phénomène, encore renforcé par ce qu’il faut bien appeler, à mon sens, une nouvelle « crise du sujet ».

Du coup, l’illustration botanique, cette discipline que « l’art moderne » puis « l’art contemporain » avait largement négligée, la renvoyant d’un côté à la finalité strictement scientifique de ses débuts (identifier et répertorier les espèces végétales), de l’autre à un passe-temps suranné et devenue quelque peu ridicule, s’en trouve valorisée.

J’en trouve la preuve dans nombre de travaux d’artistes contemporains et d’expositions récentes.

Comme si le végétal n’avait pas tout dit. Qu’il avait encore quantité de choses à nous apporter, que ce soit au niveau créatif, esthétique, mais aussi psychologique, comportemental, etc.

Jacky Jousson T-Proust B 20x28
Aubépine, aquarelle et pointe d’argent, réalisée par Jacky Jousson, 24 x 30 cm - Copyright ©Jacky Jousson

Qu’une grande firme de joaillerie choisisse, pour valoriser sa production, d’exposer les travaux préparatoires d’artisans (artistes ?), aux côtés d’artistes contemporains ou d’amateurs éclairés, est symptomatique de ce retour.

Et ce ne sont pas tant, en fin de compte, les bijoux, mais les études préparatoires (croquis, esquisses, maquettes) qui nous touchent le plus aujourd’hui ; les confronter à des œuvres d’artistes contemporains où les deux partis se nourrissent l’un de l’autre, en dit long.

Il me paraît que le vrai challenge auquel est aujourd’hui confrontée l’illustration botanique, réside là : comment, en naviguant entre une technique parfaite mais parfois desséchante, et la liberté de tout faire au risque de négliger les spécificités de la plante, restituer la vie du motif ?

Comment savoir réinterpréter l’apport de l’art contemporain (liberté, épuration, compositions renouvelées, kitsch, grâce, expression personnelle… que sais-je ?).

Comment dessiner une rose après les compositions parfaitement minimalistes d’Ellsworth Kelly ? Se réapproprier les graminées, après les photos d’Ursula Schultz-Dornburg ? Mondrian dessinait une fleur par jour pour ne pas perdre la main. Et les grands panneaux floraux de Cy Twombly sont peut-être ses plus belles réalisations…

Autant de pistes qui s’offrent à nous, stimulantes et pleines de promesses.

Elisabeth Vitou
Artiste botanique
Enseigne l’illustration botanique dans le cadre de la Société Nationale d’Horticulture de France
Exposition « Végétal, l’école de la beauté », présentée par Chaumet à l’École nationale des Beaux-Arts de Paris (16 juin – 4 septembre 2022).

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Cet article a été rédigé par Elisabeth Vitou, artiste botanique, suite à l’appel à articles de Tela Botanica sur le thème “Art et botanique”.

Si le thème vous intéresse, nous vous invitons à nous transmettre vos articles du 18 août au 13 octobre 2022 directement sur le site de Tela Botanica, en ajoutant le mot clé « Art et botanique » à votre titre. Pour connaitre toutes les conditions de participation, rendez-vous sur l’article de lancement de l’appel.

  • Appel à articles "Art et botanique"

    Peinture, sculpture, architecture, musique, littérature, les herbes ont su se glisser dans tous les arts. Sources d’inspiration, elles ont donné lieu à des chefs-d'œuvre reconnus comme "Les Nymphéas" de Monet …

2 commentaires

  1. bonjour, ravi de découvrir vos travaux et votre dynamique, figurez vous que je  »colle » à 100% aux objectifs : botaniste universitaire, artiste professionnel (Larousse, Maison rustique etc) et peinture depuis 1995, après une carrière écourtée dans l’industrie, écologue convaincu, je viens de participer à un programme collectif- ville de Pont-chateau apiculteurs-  » Le Vallon des butineurs »:
    présentation du rapport plantes méllifères -insectes avec une vingtaine de panneaux où justement les illustrations façon muséum remportent un succès naissant dans le grand public. Vaste ambition que de sensibiliser la population aux questions environnementales avec une artificialisation des sols et une course aux déserts  » PROPRES « : en effet, L’ART a son mot à dire !!! A vous lire, courtoises slts

  2. Merci de nous avoir fait partager cette intéressante réflexion (et bravo pour votre dessin) ; vous auriez pu ajouter (entre autres) les grandes fleurs de Georgia O’ Keefe. En effet, les pratiques modernes et contemporaines du dessin (et de la peinture) bouleversent-elles les pratiques du dessin dit « naturaliste » ?

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