Le Maroc sauvera-t’il ses écosystèmes ?

Les forêts d’arganiers, de genévriers thurifères, de cyprès de l’Atlas, de thuyas, de chênes-liège, de chênes zène, de chênes tauzin, de sapins ou de cèdres figurent entre autres parmi les écosystèmes cardinaux du Royaume du Maroc, pays de la Méditerranée occidentale à la biodiversité la plus riche et la plus variée.

Sous l’emprise d’un incommensurable abus d’usages, notamment d’un surpâturage irraisonné, mais aussi des affres d’une sécheresse de plus en plus drastique, le Maroc a perdu quasiment la moitié de sa masse forestière depuis les années 1950. Parallèlement et sous l’effet de cette surcharge des parcours sylvo-pastoraux, ce qui reste des plus grands massifs ne sont plus que des forêts fossilisées, sans régénération, des carcasses vidées de toutes leurs diversités végétale et animale.

À cette cadence, il ne faut pas être devin pour pouvoir affirmer que bien avant 2050, il n’y aura plus un arbre sauvage au Maroc. 93 % de désertification potentielle est le chiffre alarmant déjà annoncé par l’UNESCO pour le territoire marocain.

Ces dernières années, suite à une prise d’éco-conscience universelle, mais aussi face au péril qui guette une population rurale inquiète parce que largement tributaire des ressources naturelles, des initiatives citoyennes ont donné l’alerte et certains programmes administratifs subséquents ont été élaborés pour tenter d’inverser les tendances.

Pour ce qui nous concerne, nous nous sommes particulièrement attachés à communiquer à propos de la forêt de cèdres, tout à la fois patrimoine de l’Humanité et formation dilapidée à des fins d’enrichissement personnel par les exploitants de la filière ovine. L’une des conséquences de notre action fut la légitime initiative du Haut Commissariat aux Eaux et Forêts pour l’établissement d’un Plan d’Aménagement et de Gestion du Parc National d’Ifrane, lequel abrite les plus belles cédraies marocaines.

Une évaluation de la biodiversité pour un nouveau plan directeur du Parc avait donc été demandé par l’administration à un comité scientifique d’experts bénéficiant d’une grande expérience de la cédraie qui, tout 2006, réunissait sur le terrain et en ateliers : Fabrice Cuzin, coordinateur et mammologie, Abdelmalek Benabid, flore et végétation, Michel Tarrier, entomologie bio-indicatrice, Lahcen Chilasse, ornithologie, Mohamed Fekhaoui, herpétologie.

Pour ma part (Michel Tarrier), je voudrais louer l’initiative du gestionnaire pour avoir inclus, dans cette étude, l’entomologie bio-indicatrice, et notamment les Lépidoptères diurnes qui sont d’excellents indicateurs de la santé des sites. Il s’agit d’une initiative presque pionnière. Le papillon est le reflet de ce qu’il y a dessous… La cédraie est riche d’un exceptionnel cortège de papillons, pour beaucoup endémiques. La plupart sont en grave recul, si ce n’est en déclin, certains ont déjà disparus, catastrophique hécatombe qui est la réponse à un troupeau d’un « petit » million de têtes qui piétinent, tondent et scalpent tout dans le Parc National.

Je propose à ceux que cela peut intéresser l’expertise que j’ai menée, avec le soutien du Haut Commissariat aux Eaux et Forêts, pour tenter de sauver la cédraie et ses papillons. Les photographies illustrant cette étude raviront les esthètes et les amoureux de la Nature marocaine, une Nature si belle et si riche que nous n’en accepterons pas le saccage délibéré parce qu’elle mérite d’être protégée comme la prunelle de nos yeux.

Rapport d’expertise entomologique du Parc National d’Ifrane :

http://homepage.mac.com/jmdelacre/HomePage2/
http://homepage.mac.com/jmdelacre/papilionoidea_2/page94/page94.html

À l’attention des spécialistes impliqués dans la conservation de la biodiversité, nous joignons la version finale du Plan d’Aménagement et de Gestion du Parc National d’Ifrane (stratégies de conservation et principes de zonage, coordination : Rémi Grovel), ainsi qu’une synthèse des expertises scientifiques en amont de la procédure :

http://homepage.mac.com/jmdelacre/PNIfrane_rapport-_final-strategie_V_07.pdf
http://homepage.mac.com/jmdelacre/PNIfrane_rapport_final_annexes_V_07.pdf
http://homepage.mac.com/jmdelacre/Synthese_definitive_light.pdf

L’arsenal de textes se voulant protecteurs de la cédraie est désormais édifiant. Ces milliers de nouvelles lignes d’expertises, de rapports, de stratégies, de recommandations et de règlements savamment constitués sauront-il faire barrage au simple cheptel dévastateur de la biodiversité concernée ? Sauront-ils mettre à l’abri quelques parcelles résiduelles d’un biopatrimoine saigné aux quatre veines, rétablir les judicieux défens d’antant qui, comme « par désenchantement », avaient disparus dès lors qu’il fut question de développement soutenable ? Ou bien tout cela s’inscrit-il encore dans l’incohérence et le faux-semblant cosmétique qui caractérise nos sociétés, dans le hiatus qui sépare la bureaucratie du terrain, l’intention de la réalisation, la théorie de la pratique ?

Le Maroc sauvera t’il ses écosystèmes ?
Ceux qui vivront verront, ou ne verront pas.

Michel R. TARRIER
Apartado postal 15553, E-29080 Malaga (España)
34-952.960.182 / 34-629.528.333
tarrier@ctv.es

2 commentaires

  1. Il existe de nombreux facteurs qui contribuent à la destruction des écosystèmes du Maroc. Mais le Surpâturage, la sécheresse, le feu, la pression anthropique, les attaques parasitaires…ne sont pas, à mon avis, les seuls facteurs à incriminer. Un autre facteur, sinon le plus déterminant, est celui des responsables de la gestion de l’Etat qui est le Gouvernement et ses politiques dévastatrices des Forêts, des Palmeraies, des littoraux et de la biodiversité de notre patrimoine naturel.
    La gravité de ce dernier facteur, émane du fait que, en un laps de temps si court, on peut assister à la destruction de tout un territoire de façon légale et avec toute impunité. Le gouvernement Marocain, sous prétexte de trouver une solution au problème de chômage, est entrain de détruire tous les écosystèmes des littoraux en prétendant développer le tourisme et créer des emplois. Des milliers d’hectares de forêts ont été décimés au nom du développement, de la croissance et de la création de richesse. Des milliers de tortues grecques et de calcidès ont été tués pour accueillir plus de dix millions de touristes par an.

    1. d’abord, je me presente, je suis un jeune forestier marocain,qui a commence sa carriere en tant que forestier dans la zone sud, c’est a dire dans l’Arganeraie
      en ce qui concerne les ecosystemes marocaines , je crois que malgre les tentatives de sauvegarde et de rehabilitations de ces richesses, et puisque les politiques nationales ne prennent pas en consideration ce point qu’est les ecosystemes, je crois qu’aucune preservation ne peut etre reussis,
      alors je suis tous a fait d’accord avec le message deja poste
      et j’espere que les politiques changeront pour laisser nos richesses naturelles en paix et les sauvegarder pour les generation futures.

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