Une nouvelle forme de résistance au glyphosate chez Amaranthus palmeri
Le Roundup, produit phare de Monsanto, est l’herbicide le plus vendu au monde. Une étude montre que, suite à l’utilisation de ce type de produit, l’amaranthe de Palmer a développé une résistance au glyphosate.
Le glyphosate, principe actif
Le principe actif du Roundup est le glyphosate. Celui-ci agit en inhibant une enzyme, l’EPSPS (5-enolpyruvylshikimate-3-phosphate synthase), impliquée dans la synthèse d’acides aminés aromatiques indispensables tels que la tyrosine, la phénylalanine et le tryptophane chez les végétaux. Combinée à la technologie Roundup Ready, dont le principe est de conférer par manipulation génétique une résistance au glyphosate chez des plantes cultivées telles que le coton ou le soja, l’utilisation du Roundup a pour but essentiel de simplifier les pratiques culturales : la pulvérisation de l’herbicide sur un champ d’OGM Roundup Ready est censée détruire toutes les « mauvaises herbes » sauf la plante OGM.
En 2008, sur les 120 millions d’hectares plantés avec des OGM, environ 85 % sont résistants aux herbicides, dont la quasi-totalité au glyphosate. C’est dire l’importance du marché que représente cette technologie pour Monsanto, leader mondial dans ce domaine.
La résistance s’organise dans les champs
Une étude publiée dans le numéro des comptes-rendus de l’Académie des sciences américaine (Proceedings of the National Academy of Sciences) daté du 19 janvier [[ POWLES Stephen B., Gene amplification delivers glyphosate-resistant weed evolution, Proceedings of the National Academy of Sciences of the United-States of America (PNAS), 2010 107 : 955-956.]] (Voir un aperçu de l’article) montre comment l’amaranthe de Palmer (Amaranthus palmeri), une « mauvaise herbe », a développé une résistance au glyphosate.
Menée par des universitaires américains, australiens ainsi que par des chercheurs de Monsanto, cette étude révèle la nature du phénomène de résistance chez des plantes issues d’un champ cultivé situé dans l’état de Géorgie.
Déjà observé depuis de nombreuses années, le phénomène de résistance au glyphosate ne cesse de s’étendre aux Etats-Unis : selon les estimations des auteurs, en 2009, l’amaranthe de Palmer résistante occupait au moins 250 000 hectares, essentiellement dans les états de Géorgie, du Tenessee, de la Caroline du Nord, de la Caroline du Sud et de l’Arkansas.
Simple conséquence, très prévisible, du principe de sélection darwinienne, l’application du glyphosate de manière exclusive sur des monocultures telles que celle du coton, a pour conséquence la sélection de souches résistantes chez les plantes indésirables.
Plusieurs mécanismes ont déjà été décrits pour expliquer la résistance au glyphosate, déjà confirmée chez 16 espèces de mauvaises herbes.
Le mécanisme mis en évidence chez l’amaranthe de Palmer s’apparente à celui déjà observé chez le moustique du genre Culex face aux insecticides de la famille des organophosphorés.
L’étude montre que l’amaranthe de Palmer a développé sa résistance au glyphosate en amplifiant le gène responsable de la synthèse de l’enzyme visée par l’herbicide, c’est-à-dire en recopiant le gène en plusieurs exemplaires au sein de son génome.
Ainsi, certaines souches présentent jusqu’à 160 copies du même gène. Cette amplification est corrélée avec un haut niveau de production de l’enzyme EPSPS, ce qui confère sa résistance à la plante. Par ailleurs, les chercheurs ont montré en laboratoire que cette caractéristique est héréditaire.
D’où, de l’aveu des auteurs (y compris les chercheurs de Monsanto), une situation « particulièrement problématique » qui pourrait remettre en question la pertinence de la technologie Roundup Ready et plus largement celle de l’utilisation d’OGM résistants au glyphosate.
Jérôme OZOUF
8 commentaires
Voici une nouvelle de plus en faveur de l’arrêt des OGM car la nature reprendra ses droits quoi qu’en penses les « chercheurs de pouvoir et d’argent » .
Vouloir maitriser la nature n’est qu’un leurre de plus pour une toute petite partie de l’humanité.
Cette problématique est soulevée depuis des décennies par tous et les dangers d’une telle inconscience de la part des gros groupes entrainera à la perte la société qui les fait vivre mais non de l’environnement qui s’adaptera, certes avec beaucoup de concessions et de changements par rapport à aujourd’hui, mais survivra et déploiera un « nouveau monde » tout aussi beau, mais certainement sans l’homme car la terre ne fera pas 2 fois la même erreur….
bravo, pour cette vision de choses,,je suis tout a fait d’accord, merci
Vision très problématique d’un point de vue épistémologique. D’abord la « nature » (il faudrait déjà définir l’objet duquel on parle) n’a pas de volonté.
Ensuite, on ne peut pas généraliser ce cas à tous les OGM. Bien sûr quand on a une action sur la mortalité des plantes, on sélectionne des résistances. Rien de très nouveau. Mais les OGM sont utilisés dans de très nombreux domaines et pour certains ce type de sélection ne joue pas. Parler « des OGM » amène forcément à des positions dogmatiques sans intérêt.
Merci pour ces infos. Hélène Larrivé
Utilisateur de Round Up depuis plus de 30 ans, je sais d’expérience que :
– il y a eu dès le premier jour des plantes résistantes en France (dont une petite oseille et une épilobe). Ce qui est en rien une surprise. Aucun désherbage, qu’il soit manuel ou chimique, est une panacée.
– qu’aucun agriculteur un peu sensé utiliserait uniquement cette méthode pour désherber, car il est évident qu’il aura sélection de mauvaises herbes résistantes, comme cela se passe aussi avec les insectes (on alterne les insecticides pour ne pas avoir des souches résistantes de pucerons).
– qu’il suffit de faire un désherbage avec une autre technique de temps en temps (un autre désherbant ou un déserbage mécanique comme un passage de « cultivateur » quand la parcelle commence à se salir avant le semis) pour supprimer les souches résistantes, à conditions d’y avoir penser dès le départ… Et pas quand le terrain est déjà truffé de graines de ces mauvaises herbes résistantes.
Quand on est dans un pays où il y a naturellement des amarantes, on fait très attention !
– que les amarantes sont des plantes qui produisent des millions de graines.. Et qu’il est très difficile de s’en débarrasser quand on a laissé son champ infester, quelque soit la méthode employée.
Il était donc absurde de n’utiliser que du round up plusieurs années de suite, il n’y aurait eu aucun problème si on avait prévu un désherbage mécanique en plus, une fois tous les x années…
Le problème, ce n’est donc pas le round up, c’est la manière avec laquelle il a été utilisé
PS : les salamandres, couleuvres, orvets, lézards, grenouilles, crapauds, carabes, scarabées, vers de terre et autres sympathiques et utiles petites bestioles, ne sont troublés en rien par l’utilisation du round up…
Comment osez-vous prétendre que le Round-Up ne « trouble en rien les salamandres, couleuvres, orvets, lézards, grenouilles, crapauds, carabes, scarabées, vers de terre et autres sympathiques et utiles petites bestioles » ?
Mangez donc une salade arrosée au round-up, constatez les dégâts et revenez nous dire que des animaux plusieurs centaines de fois plus petits que nous, ne seraient affectés en rien par l’utilisation de ce pesticide dont la dangerosité est dénoncée partout ?
Bon courage pour votre probable futur cancer (que je ne vous souhaite pas) ; toutes les études sont formelles, les agriculteurs utilisant des pesticides, ont une incidence de cancers (notamment prostate, myélome et lymphome) bien supérieure à la moyenne. Pour certains produits utilisés, l’incidence de cancer est jusqu’à deux fois supérieure.
Quand aux batraciens, et insectes, bactéries bénéfiques, la dangerosité du roundup n’est plus à prouver (malgré le lobbying agressif des firmes le fabriquant en direction du public ou des pouvoirs politiques).
Les études AGRICAN (cohorte de plus de 180 000 agriculteurs français) prouvent la dangerosité des pesticides, merci, Pierre, de vous renseigner.