La cueillette des plantes sauvages dans le Massif central : état des lieux et perspectives…

Ces dernières années, l'engouement porté par un très large public autour des produits « naturels » a fortement contribué au développement de filières artisanales et industrielles pour lesquelles les plantes sauvages constituent la matière première : huiles essentielles, médicaments homéopathiques, préparations pharmaceutiques, produits cosmétiques, herbes aromatiques, confiseries, liqueurs, etc.

Ces dernières années, l’engouement porté par un très large public autour des produits « naturels » a fortement contribué au développement de filières artisanales et industrielles pour lesquelles les plantes sauvages constituent la matière première : huiles essentielles, médicaments homéopathiques, préparations pharmaceutiques, produits cosmétiques, herbes aromatiques, confiseries, liqueurs, etc.

Le Massif central, tout comme les autres massifs montagneux de France, concentre de forts enjeux socio-économiques et écologiques autour de la cueillette de plantes sauvages à des fins artisanales et industrielles. À la différence de la production de plantes à parfum, aromatiques et médicinales, et bien qu’elle ait déjà fait l’objet de nombreuses études à caractère culturel, historique ou ethnobotanique, il demeure difficile de réunir des données macroéconomiques qualitatives et quantitatives permettant d’établir une liste précise des acteurs de la filière et d’en connaître le poids économique et social. Il est tout autant difficile d’établir une liste exhaustive des plantes prélevées, des pratiques et modes d’extraction qu’ils soient familiaux, artisanaux ou industriels. Lorsque l’on connaît la difficulté d’estimer l’importance économique de la cueillette de quelques espèces de champignons, on peut dès lors imaginer l’obstacle bien plus important pour estimer celle de plusieurs centaines de plantes sur un vaste territoire tel que le Massif central…

Pour autant, la flore ne doit pas être considérée comme une ressource inépuisable. À l’instar des ressources piscicoles maritimes voire de toutes ressources naturelles, son exploitation nécessite une parfaite connaissance de l’état des populations à l’échelle locale mais aussi nationale, des conditions écologiques et des processus biologiques leur permettant de se reproduire et de se développer, ou encore des techniques d’exploitation respectueuses de la ressource et de sa gestion durable, voire des besoins et des pratiques des consommateurs eux-mêmes.

Vers un état des lieux partagé…

De part son rôle d’expert en matière de flore et de végétation sauvages, le Conservatoire botanique national du Massif central est régulièrement sollicité sur l’état des ressources tant par les cueilleurs eux-mêmes que par les services de l’État ou les organismes de préservation de l’environnement.
Pour répondre aux questions récurrentes, en partenariat avec la DREAL Auvergne, la Société d’intérêt collectif agricole de la région Auvergne des plantes à parfum, aromatiques et médicinales (SICARAPPAM), le Syndicat inter-massif pour la production et l’économie des Simples (SIMPLES), l’Association française des cueilleurs (AFC), le CBN Massif central a proposé la mise en œuvre d’une première étude visant à mieux connaître la filière professionnelle de la cueillette, son organisation, ses attentes, ses enjeux socio-économiques et écologiques, mais aussi à mettre en relief les connaissances acquises par le CBN sur les ressources végétales, ses fragilités et ses potentialités.
La réalisation de cette étude nécessitera la collaboration d’un grand nombre d’organismes et de chercheurs qui oeuvrent autour de la connaissance de cette filière : Conservatoires botaniques nationaux (Pyrénées et Midi-Pyrénées, Alpin, Porquerolles, etc.), instituts de recherche (IRD, CNRS, INRA, etc.), universités et chercheurs universitaires (ENITA, VETAGROSUP, HEPIA, etc.), organismes de formation, organismes professionnels (FranceAgriMer, FNPAPAM, ITEIPMAI, CNPMAI, CPPARM, etc.)… Elle contribuera également aux nombreux travaux menés à l’échelon national par d’autres organismes et alimentera les réflexions pour une gestion durable des ressources naturelles.

Le Conservatoire botanique national du Massif central

Le Conservatoire botanique national du Massif central est un établissement public à caractère scientifique et technique agréé par le Ministère chargé de l’environnement et de l’aménagement du territoire depuis le 10 juin 1998. Il intervient sur les 10 départements qui composent son territoire d’agrément, soit 57 000 km2, répartis sur 3 régions administratives : Auvergne (Allier, Cantal, Haute-Loire, Puy-de-Dôme), Limousin (Corrèze, Creuse, Haute-Vienne), Rhône-Alpes (Ardèche, Loire, Rhône). En application du décret du 8 juillet 2004 relatif aux Conservatoires botaniques nationaux, il mène, sur cet espace, une quadruple mission de connaissance de l’état et de l’évolution de la flore sauvage, de la végétation et des habitats naturels et semi-naturels, de conservation des éléments les plus rares et menacés, d’expertise auprès de l’État, des établissements publics et des collectivités territoriales, et enfin de sensibilisation du public. Depuis son dernier agrément, le CBNMC assure également une mission de coordination biogéographique des actions des Conservatoires botaniques nationaux sur l’ensemble du Massif central.

Depuis sa création, cet établissement centralise toute information botanique relative à son territoire qu’elle soit issue d’ouvrages, de manuscrits et d’herbiers, anciens et contemporains, ou d’observations transmises par son équipe, ses partenaires et par un réseau de plus de 380 botanistes associés. En complément du dépouillement des données anciennes, les botanistes du Conservatoire et de son réseau œuvrent à l’inventaire cartographique général de flore vasculaire, des bryophytes et des charophytes du Massif central. Cet inventaire général, a pour objectif de couvrir l’ensemble du territoire d’agrément du Conservatoire sur un pas de temps réduit (2001-2013) et sur la base d’une trame de prospection de 2 464 mailles UTM de 5 x 5 km. Au 1er décembre 2011, après dix années d’effort, le CBN Massif central disposait de plus de 4,6 millions de données floristiques informatisées. Parce que le CBN est aujourd’hui en mesure d’apporter un regard pertinent sur l’état et l’évolution de la flore locale, les menaces qui pèsent sur elles et ses enjeux patrimoniaux, les services de l’État s’appuient sur ses connaissances et son expertise pour mettre en œuvre des politiques de préservation de la biodiversité.

C’est à travers ce double regard d’une récente et importante acquisition de connaissances et de la volonté de préserver la diversité floristique du Massif central que le CBN souhaite effectuer un état des lieux des ressources végétales cueillies, partagé par l’ensemble de la profession (cueilleurs, producteurs, coopératives, syndicats, industriels) et par les organismes chargés de la préservation de l’environnement (parcs naturels, réserves naturelles, conservatoires des espaces naturels, conservatoires botaniques, services de l’État et des collectivités, etc.). À terme, cette étude contribuera à mieux cerner les enjeux tant socio-économiques qu’écologiques de la filière.

Cinq approches de la cueillette

Afin d’apporter un éclairage complet sur l’état de la cueillette sur le Massif central, l’étude est envisagée à travers cinq approches :

Une approche bibliographique et culturelle…
L’abondante bibliographie ethnobotanique sur le Massif central permettra de resituer la cueillette dans un cadre historique et national. Quelles plantes ont été cueillies par le passé et par quels modes opératoires ? À quelles fins étaient destinées les plantes cueillies ? Quels étaient les principaux acteurs de la filière et comment était-elle organisée ? Voilà quelques-unes des questions auxquelles devra répondre l’étude.
Cette approche sera également l’occasion de prendre connaissance de travaux récents réalisés par d’autres organismes, à l’échelon régional et national… Elle fera également le point sur certaines ressources utilisées depuis plusieurs décennies et entrées dans le capital culturel et historique du Massif central : Gentiane jaune (liqueurs), Arnica des montagnes (pharmacie), Myrtille (confiserie), Narcisse des poètes (parfumerie)…

Une approche économique…
À travers une enquête économique s’appuyant notamment sur les statistiques de l’INSEE et de nombreuses rencontres avec la filière, l’étude envisage de mettre en évidence des données macroéconomiques quantitatives et qualitatives sur le Massif central et d’établir des listes typologiques permettant des comparaisons avec d’autres territoires. Il s’agira alors de connaître les différents types d’acteurs procédant à la cueillette, les modes opératoires, les catégories de produits élaborés à partir des plantes cueillies, les usages actuels. Il s’agira également de constituer une liste précise des entreprises individuelles et des sociétés œuvrant dans ce domaine, leur importance économique et sociale (chiffre d’affaire, emplois générés,…). Enfin, cette étude de la filière s’intéressera aux principaux transformateurs et consommateurs de produits de cueillette, notamment dans la perspective de mettre en évidence les lois d’offres et de demandes agissant sur la pression des cueillettes.

Une approche botanique et scientifique…
À partir des connaissances sur la flore et des éléments statistiques réunis depuis plus de 10 ans, et de la liste des espèces cueillies sur le Massif central, élaborée sur la base de la bibliographie et des enquêtes de terrain, le CBN Massif central sera en mesure de fournir, pour chaque espèce cueillie, des indications sur l’abondance de la ressource, sa pérennité, ses fragilités : niveau de menaces, rareté régionale et nationale, statuts de protection actuels, répartition régionale et nationale. Il pourra, de fait, lister les espèces fragilisées ou pouvant l’être par toute forme d’exploitation et préconiser les ressources pouvant faire l’objet d’une cueillette sans risque écologique avéré. Il pourra aussi préciser les pratiques agropastorales associées à la présence même et au développement de certaines espèces.

Une approche humaine et ethnobotanique…
Néanmoins, la cueillette est exercée avant tout par des hommes et des femmes qui vivent sur le territoire, qui tirent un revenu ou un intérêt quelconque de celle-ci. Elle fait appel à une histoire, une culture, des codes déontologiques, des savoir-faire, des connaissances qu’il convient d’appréhender finement dans le cadre de cette étude. Au delà des questions déjà évoquées précédemment et de leur approche plus scientifique, l’enquête auprès des acteurs de la cueillette visera à connaître les attentes de la profession vis à vis des services de l’État mais aussi des corpus scientifiques dont fait partie le CBN Massif central. Quelles sont les difficultés du métier ? Quels outils seraient à mettre en œuvre pour connaître, préserver et gérer les ressources ? Quels échanges d’informations imaginer entre les organismes chargés de la préservation de l’environnement et les entreprises exploitant les ressources végétales sauvages ? Quelles valorisations culturelles pourraient être imaginées autour de ce dialogue ? Un dialogue et une concertation très large seront donc mis en œuvre autour de cette étude, tant pour affiner les méthodes et les moyens déployés que pour répondre aux enquêtes et partager les résultats. Parmi les outils à imaginer est déjà évoquée l’idée de réaliser des monographies des principales espèces cueillies comportant une carte de répartition et une carte des zones protégées, un état des lieux des populations, des recommandations de dates, de fréquences et de modes opératoires durables de cueillette. Ces monographies seraient accompagnées de descriptions des usages, des débouchés économiques et des enjeux environnementaux de l’espèce considérée… Il s’agira également d’imaginer des actions d’information à destination des négociants, des transformateurs et des consommateurs.

En attendant les résultats de cette étude ambitieuse – pour laquelle certaines réponses ne pourront éventuellement pas être données dans le temps imparti (fin de l’étude en Août 2012) – il convient de souligner la volonté d’instaurer un dialogue sincère entre tous les acteurs de la filière pour que la richesse floristique du Massif central héritée d’un long passé agropastoral et traditionnel, soit durablement préservée, partagée et valorisée.

Pour toute information complémentaire, contacter :

>> Stéphane Perera
Chargé de communication & de médiation scientifique
Courriel : stephane.perera@cbnmc.fr

>> Conservatoire botanique national du Massif central
Le Bourg – 43230 CHAVANIAC-LAFAYETTE
Téléphone : 04 71 77 55 65
Courriel : conservatoire.siege@cbnmc.fr

>> Violaine Laucoin
Stagiaire au CBN Massif central (01/03/12 – 31/08/12)
Courriel : violaine.laucoin@gmail.com
Téléphone : 06 81 42 62 38
Etudiante en Master 2 Environnement, Aménagement
Parcours Biodiversité, Ecotoxicité, Ecosystèmes
Spécialité Conservation et Restauration de la Biodiversité
Université Paul Verlaine de Metz (57)

Communiqué

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Photo d’illustration : La cueillette des orties par arpent nourricier, Flickr, licence CC (by-sa).

2 commentaires

  1. laurence.lemelinaire2@orange.fr bonjours je n’habite plus dans le massif central ,hélas olliergues mais dans la haute garonne en campagne . j’étais maraichère durant 17 ans et j’aimerai maintenant ceuillir des bourgeons pour ?? qui aura besoin , je fais déjà ceux dont j’ai besoin et ai une solide connaissance des plantes . pour ceux qui connaissent je suis une amie de James Forest paysan boulanger , résidant à gantis et ayant eu un lien avec l’école lyonnaise des plantes.

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