Forêt marronne, de Jacques Tassin
Entre le roman philosophique, l’effusion poétique et l’essai sur la connaissance première du végétal, Forêt marronne est une invitation à reprendre contact avec les arbres, à retrouver cette forêt perdue que l’on a voulu plier à notre propre regard, parfois même asservir, et qui s’est enfuie loin de nous pour devenir marronne, tels les esclaves enfuis des plantations.
En écrivant Forêt marronne, Jacques Tassin, écologue au Cirad, s’en est remis à deux intercesseurs, un esclave échappé d’une plantation de caféiers au XVIIIe siècle, et de manière plus actuelle, un ermite excentrique et un peu misanthrope qui a choisi d’ancrer son destin aux frondaisons des arbres.
A trois siècles d’écart, sur la même petite île de Bourbon (La Réunion), l’un et l’autre dialoguent, rappelant chacun à sa manière que la forêt est le plus lointain berceau du genre humain. L’esclave Tan Rouge nous touche par sa sincérité, le doctoral Robin nous agace parfois par ses envolées magistrales. Mais tous deux ont beaucoup à nous dire sur la réalité intime des arbres.
Approcher le vivant, en toucher l’essence première, le cœur libre et toute pensée cessante, s’en remettre aux forces souveraines de son instinct pour retrouver le monde par l’entremise des arbres, reprendre lien avec le fil chaud et lumineux de la vie et le sentir vibrer quand on l’effleure, telle est la flèche directrice de ce livre qui ravira les naturalistes les plus authentiques et les plus sensibles.
Forêt marronne (juin 2013). Editions Orphie, Collection autour du monde, 200 p.