Nature déboussolée : « Au sein de notre laboratoire, personne n’a jamais vu ça »

Framboises, jonquilles et abeilles ont donné aux fêtes de fin d'année un goût printanier. D'où vient ce réveil précoce de la nature ? Pour quelles conséquences ? Réponses d'Isabelle Chuine, directrice de recherches au CNRS

Framboises, jonquilles et abeilles ont donné aux fêtes de fin d’année un goût printanier. D’où vient ce réveil précoce de la nature ? Pour quelles conséquences ? Réponses d’Isabelle Chuine, directrice de recherches au CNRS

Terra eco, 12/01/16. Propos recueillis par Amélie Mougey

Floraisons anticipées, bourgeons prêts à éclore, insectes pollinisateurs qui oublient d’hiberner : aux quatre coins de la France, beaucoup ont constaté, et parfois immortalisé, les symptômes d’une nature déboussolée. Isabelle Chuine, directrice de recherches au CNRS (Centre national de la recherche scientifique), s’intéresse à la phénologie des végétaux, c’est-à-dire au lien entre les évènements périodiques qui rythment la vie des espèces et les variations saisonnières du climat. Au sein de l’Observatoire des saisons, dont elle est la responsable scientifique, elle s’apprête à analyser les anomalies de décembre-janvier. Avant que les travaux scientifiques – qui s’appuieront sur les contributions d’observateurs bénévoles, notamment celles des lecteurs de Terra eco – nous livrent toutes les clés, la chercheuse donne un premier éclairage sur les causes et conséquences de ces phénomènes étranges.

Notre étonnement face aux iris en fleurs en décembre est-il partagé par les chercheurs ?

Isabelle Chuine : Oui, au sein de notre laboratoire de recherches, personne n’a jamais vu ça. La situation, marquée par des floraisons extrêmement précoces, est exceptionnelle. Des espèces à floraison hivernale, comme le mimosa et le noisetier, ont fleuri dès novembre. Pour d’autres, dont la floraison est normalement printanière – iris, jonquilles, forsythia et lilas -, cela a commencé en décembre.

Comment expliquer ces anomalies ?

Au début du mois d’octobre, nous avons connu une petite vague de froid qui a duré huit jours, suivie de températures extrêmement douces. Cet épisode a envoyé à certains végétaux le signal que l’hiver était passé. Les espèces dont les besoins en froid sont les plus faibles ont alors levé leur dormance et la croissance cellulaire a débuté.

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Daniel MATHIEU
Tela Botanica

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